Proposition de résolution déposée par Philippe Mahoux et Pierre Galand relative à la conférence intergouvernementale,
4 décembre 2003

DEVELOPPEMENTS
Les auteurs proposent une liste de questions prioritaires pour le gouvernement lors des négociations dans la Conférence intergouvernementale. Philippe Mahoux, Pierre Galand


PROPOSITION DE RÉSOLUTION


Le Sénat,

A. vu le projet de traité établissant une constitution pour l'Europe élaborée par la Convention sur l'avenir de l'Europe;

B. vu ses résolutions nº 2-965 du 3 décembre 2001 relative à l'avenir de l'Europe adressée au Conseil européen de Laeken, nº 2-923 du 4 octobre 2001 relative à la déclaration de Laeken et nº 2-451 du 23 mai 2000 relative à la Conférence intergouvernementale de 2000;

C. vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne;

D. vu la communication de la Commission européenne sur « Une constitution pour l'Union»;

E. vu la note « Position du gouvernement belge par rapport à la Conférence intergouvernementale »;

F. vu la résolution nº 117 de l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale sur « Les perspectives de la politique européenne de sécurité et de défense Contribution à la Conférence intergouvernementale »;

G. considérant que la méthode de la Convention a prouvé son utilité dans la préparation de la révision des traités européens, et que cette méthode a permis l'élaboration d'un compromis minimal mais équilibré;

H. se réjouissant que le projet de Constitution :

a) constitue une nouvelle phase dans la voie vers la constitutionnalisation des traités européens,

b) réaménage fondamentalement les traités existants en une partie de base (y compris la Charte des droits fondamentaux) faisant office de Constitution, et une partie contenant des dispositions d'exécution,

c) confère la personnalité juridique à l'Union européenne, définisse mieux les compétences de l'Union et contribue au meilleur fonctionnement des institutions de l'Union,


demande au gouvernement de tenir compte de ce qui suit pendant les négociations dans la Conférence intergouvernementale :

1. Les équilibres fondamentaux du projet de Constitution ne doivent pas être remis en cause. Ceci n'empêche pas que le CIG puisse encore améliorer, clarifier et finaliser le projet de Constitution.

2. Même s'il semble que les négociations n'aillent pas dans ce sens, il faut continuer à plaider en faveur de l'instauration d'un Conseil législatif et des affaires générales. Celui-ci permettra en effet d'assurer une réelle coordination et garantira une vraie cohérence des politiques de l'Union. Les règles de rotation pour les présidences des formations des Conseils des ministres doivent être clarifiées davantage afin de garantir un équilibre entre les États membres.

3. Les nouvelles règles concernant le calcul de la majorité qualifiée contribuent à la transparence de la prise de décision au sein du Conseil. Elles accentuent l'égalité entre les États membres. Ces règles doivent être mises en oeuvre dès que le nouveau traité est d'application. Le champ d'application de la majorité qualifiée doit impérativement être élargi à des politiques qui aujourd'hui sont toujours gouvernées par la règle de l'unanimité, principalement dans les domaines social et fiscale. Dans le même esprit, une clause sociale horizontale permettant de prendre en considération la dimension sociale dans l'ensemble des politiques de l'Union devrait être introduite dans la Constitution. En ce qui concerne l'article 24.4, le Conseil européen doit pouvoir décider à une majorité qualifiée renforcée que le Conseil peut exercer une compétence à la majorité qualifiée. L'extension de la majorité qualifiée doit aller de pair avec l'extension de la codécision du Parlement européen.

4. Le rôle de la Commission européenne comme organe indépendant qui promeut l'intérêt général européen, doit être sauvegardé et renforcé. Pour ce faire, une Commission forte et efficace est indispensable. Cet objectif ne peut être atteint que par une Commission composée d'un nombre limité de membres. Le compromis prévu dans l'article 25 est acceptable et doit être appliqué à la prochaine Commission qui sera installée après les élections européennes de juin 2004.

5. En ce qui concerne l'article 21 concernant le Président du Conseil européen, il serait souhaitable de supprimer la dernière phrase du deuxième point. De cette façon, toute confusion entre le rôle du Président du Conseil européen et celui de ministre européen des Affaires étrangères sera évitée. Par ailleurs, il est nécessaire de garantir que le Président du Conseil européen n'exercera pas un rôle concurrent à celui du Président de la Commission, ce qui nuirait au bon fonctionnement de la méthode communautaire.

6. En ce qui concerne l'article 28 relatif à la Cour de Justice, il est souhaitable que les parlements nationaux aient la possibilité d'introduire directement des recours auprès de la Cour. De la même façon, les régions à pouvoirs législatifs doivent, elles aussi, obtenir un accès direct à la Cour de Justice.

7. En ce qui concerne la politique étrangère et de sécurité commune, ainsi que la politique de sécurité et de défense commune, une attention toute particulière doit être accordée au contrôle démocratique. L'approche de l'Union européenne doit être globale en ce sens qu'elle doit contenir les différentes dimensions de la sécurité (droits de l'homme, politico-militaire, économique et environnementale) conformément aux principes de coopération qui ont servi de base au processus d'Helsinki. Les mécanismes de coopération renforcée et de coopération structurée en matière de défense doivent être préservés avec leurs règles propres de mise en ouvre.

8. En vue d'atteindre les objectifs énoncés dans l'article 3 du projet de traité constitutionnel (notamment en ce qui concerne le plein emploi et le progrès social) la politique monétaire unique de l'Union doit être complétée par une coordination renforcée des politiques économiques des États membres. En outre, des efforts supplémentaires doivent être réalisés en vue de renforcer l'autonomie des pays de la zone euro dans le cadre du Conseil. Enfin, au cas où l'évolution des négociations le permettrait, la promotion de services d'intérêt général de qualité devraient être rajoutée parmi les objectifs de l'Union.

9. En ce qui concerne les finances de l'Union, il y a lieu d'introduire un système de financement communautaire propre.

10. L'insertion de la Charte des droits fondamentaux dans le corps du projet de traité constitutionnel constitue une avancée indéniable, mais ceci n'empêche pas que des insuffisances subsistent quant aux droits sociaux intégrés dans la Charte.

11. L'intégration de la Charte des droits fondamentaux dans le projet de traité constitutionnel garantira entre autres la liberté de pensée, de conscience et de religion. Le texte du préambule respecte l'ensemble des convictions et sensibilités. Il est essentiel que le principe de séparation de l'Église et de l'État soit affirmé.

12. En ce qui concerne le protocole sur le rôle des parlements nationaux, il serait souhaitable que la Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires puisse soumettre des contributions à toute institution de l'Union européenne.

13. Il convient de rendre plus souple la procédure de révision de la partie III sur « les politiques et le fonctionnement de l'Union » du futur traité constitutionnel.



26 novembre 2003
Philippe Mahoux, Pierre Galand
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