En ce début d’année, de nombreuses publications et articles ont rappelé les différentes pistes et propositions pour mettre rapidement, si possible, du logement à petit prix sur le marché :
Construction et rénovation de logement social, gestion publique des immeubles abandonnés, transformation de bureaux en logements, de sites et bâtiments industriels, l’utilisation des dessus de commerce généralement vides, le partenariat public-privé, les AIS, les primes et incitants fiscaux à la rénovation, …
Il est une autre piste, alternative et originale, développée et peaufinée depuis plus de deux ans, par Pierre Galand et Pierre Beauvois (Espace Citoyen), à travers une série de rencontres et de colloques avec de nombreux acteurs du secteur : la rénovation de centres-villes par les fonds de pension. Les fonds de pension des entreprises de droit belge représentent un montant de quelque 15 milliards d’euros, somme à laquelle il faut ajouter les fonds de pension du secteur public (administrations locales et régionales, parlement, sénat,…. Le principe est le suivant : dégager des moyens financiers à travers des obligations souscrites par des fonds de pension, ces obligations étant émises et garanties par les régions. On dénombre quelque 70.000 logements vides à Bruxelles et en Wallonie. Le projet pourrait permettre la rénovation de quelque 7.000 logements pendant 10 ans, à un coût qui s’avère être une opération blanche pour les pouvoirs publics.
Un document reprenant un certain nombre d’interventions aux colloques, accompagné d’une synthèse et de la description du montage financier de l’opération, est à présent disponible (contact : sonet@ps.polgroups.senate.be). Différentes conférences de presse ont été organisées, tant à Bruxelles qu’en Wallonie. La prochaine étape, à l’approche des élections communales, consistera à approcher nos élus, ou futurs élus, et les syndicats.
Pauvreté
Un rapport de l’Université d’Anvers, datant de décembre 2005, indique que plus de 1,5 million de personnes, soit 15 % de la population, vit sous le seuil de la pauvreté, défini par un revenu maximum de 772 €. Ce sont les familles monoparentales, les femmes, les jeunes isolés, et les plus de 65 ans qui sont le plus touché. Et aujourd’hui, le travail ne protège plus nécessairement : 4 à 6 % des travailleurs peuvent être considérés comme des pauvres. Y compris les travailleurs indépendants (près de 10% sont victimes de la pauvreté).
Conférence interministérielle du logement (suite)
Présidée par le Ministre Christian Dupont, la conférence a accumulé les retards, certains groupes de travail n’ayant commencé à fonctionner réellement qu’en février 2006. La deuxième réunion aura lieu début mai.
Le groupe de travail « garantir un meilleur accès pour tous au marché locatif » se penche sur la création d’un fonds de garantie locative.
Le groupe de travail « fiscalité » explore différentes pistes : diminution de la TVA sur les logements sociaux, réduction du précompte immobiliser en cas de rénovation d’un logement,…
Les projets pilotes de commissions paritaires locatives de Bruxelles, Gand et Charleroi ont été installées. Il semble aujourd’hui que syndicats de locataires et de propriétaires aient intégré l’idée de la fixation d’un loyer de référence, à condition que cela se fasse en concertation.
Ces commissions devront aussi rédiger un contrat type de location.
EN REGION BRUXELLOISE
Vivre à Bruxelles, un luxe ?
C’est le titre de la carte blanche parue dans Le Soir du 3 mars (sous la plume d’Isabelle Hochart, Inter-Environnement, et de Werner Van Mieghem, du RBDH°.
Poussées de fièvre immobilière (de 35 à 50% d’augmentation) dans certaines communes : Koekelberg, Saint-Gilles, Jette. Ce qui rend l’acquisition d’un logement inaccessible aux familles à revenu moyen et modeste, même en faisant appel à la formule d’emprunt à 40 ans proposée aujourd’hui. Le loyers, quant à eux, ont augmenté en moyenne de 15% en trois ans.
Les personnes à faible revenu consacrent donc 40% de leur budget au logement, souvent mal adapté, insalubre, dans l’attente d’un logement social.
Parmi toutes les pistes avancées pour remettre du logement sur le marché, Françoise Dupuis a avancé celle « de plus petites surfaces ». En effet, les Bruxellois sont habitués à un grand confort en termes de surface, ce qui n’est pas le cas dans la majorité des grandes villes.
Par ailleurs, elle souhaite aussi reconvertir des bureaux vides en logements. Il y aurait près d’un millions de m2 de bureaux vides dans la région bruxelloise… et certains types de bureaux ne nécessitent pas d’énormes investissements pour être reconvertis en logement.
« Logements vides, vides de sens »
C’est le slogan de la campagne de sensibilisation contre les logements vides qui a été lancée à Schaerbeek au mois de février. Le but est de convaincre les propriétaires de céder la gestion de leur bien à l’agence immobilière sociale de la commune.
En ce début d’année aussi, les résultats de l’enquête menée par le Syndicat National des Propriétaires là la demande de Françoise Dupuis auprès de propriétaires de logements vides, ont été rendus publics. Quatre catégories de causes de l’inoccupation en ressortent :
- les problèmes liés aux locataires : dégâts locatifs et loyers impayés
- les problèmes liés aux quartiers : nuisances ou quartiers désaffectés
- les problèmes liés aux logements : logements souvent dégradés de la première couronne
- les problèmes liés aux propriétaires : nombreux retraités et/ou à revenus inférieurs à 2000 €, d’où impossibilité d’entretenir ou de rénover le bien.
La présentation des résultats de l’enquête fut une fois encore l’occasion de souligner le rôle que peuvent jouer les AIS à Bruxelles.
Le CDH quant à lui propose de réfléchir à une formule permettant aux personnes âgées propriétaires de leur maison de louer une partie de leur bien via les AIS. Avantage financier pour les propriétaires et les jeunes locataires qui adopteraient la formule. Et aussi création de liens sociaux intergénérationnels.
Les AIS
C’est l’une des priorités définies pour le logement à Bruxelles en 2006. Une allocation annuelle de 3 millions d’euros est allouée aux 19 AIS de la région bruxelloise qui gèrent aujourd’hui 1331 logements. L’objectif est de doubler ce nombre. Une campagne de promotion a été lancée à l’occasion de Batibouw. Et certains vous diront que l’allocation loyer existe déjà à travers les AIS, puisque le propriétaire s’engage, en contre-partie d’un loyer garanti, à louer son bien à un prix inférieur à celui du marché.
Logement social
Rénovation de la cité-jardin du Floréal à Watermael-boitsfort : un million d’euros a été accordé par le gouvernement bruxellois pour la rénovation de 28 maisons unifamiliales. Cette cité, construite entre 1922 et 1925, constitue avec le Logis, un des ensembles de logements sociaux les plus importants de l’entre-deux-guerres. Une partie des habitations a été classée en 2001 par la Commission des Monuments et sites. Les prescriptions de rénovation sont donc très sévères (rénovation à l’identique : châssis en bois, simple vitrage ( !), ce qui sous-entend des moyens financiers importants.
Par ailleurs, 19 projets de cohésion sociale existent à Bruxelles, répartis sur les grands ensembles de logements sociaux : il s’agit de retisser le lien social entre les locataires à travers l’organisation de fêtes de quartiers, de repas communautaires, et de créer des liens interculturels et intergénérationnels. Quelques opérateurs de ces projets : Union des Locataires d’Anderlecht-Cureghem, Habitat et Rénovation, le Toucan, La Rue, Dynamo, Cité Modèle,… Les moyens alloués à ces projets s’élèvent à quelque un million et demi d’euros.
Projets du quartier européen
Le point a été fait par Françoise Dupuis en ce mois d’avril sur les différents projets de logement dans le quartier européen : ce ne sont pas moins de 1000 logements qui seront disponibles dans le quartier européen (rue d’Idalie, rue Godecharles, Belliard, Froissart, place Jourdan et… Résidence Palace). Désenclaver le quartier européen, mais à quel prix ? ces projets sont financés par le secteur privé. Sur les 1000 logements prévus, sont promis : quelque 80 logements moyens, et 22 logements sociaux (rue Belliard) qui seront financés par des charges d’urbanisme découlant des autres projets réalisés dans le quartier.
Code du Logement
Le code bruxellois du logement est entré en vigueur le 1er juillet 2004.
Le bilan de son fonctionnement a été fait récemment : 2000 dossiers ont été ouverts, principalement des demandes d’attestation de conformité pour les logements de moins de 28 m2 (obligatoire à partir de ce 1er juillet 2006). Quelque 600 plaintes ont été déposées. Souvent fondées, elles ont abouti à des mises en demeure des propriétaires pour réaliser des travaux.
Enfin, 87 logements en location ont été fermés et les habitants ont été relogés.
RECONVERSIONS EN LOGEMENT
Quelques exemples intéressants :
- Reconversion d’un cinéma de quartier à Baudour, près de Mons. Aujourd’hui, ce sont huit logements qui ont été créés dans cet espace : 4 appartements d’une chambre et quatre duplex d’une et deux chambres.
- Un parking transformé en lofts à Saint-Gilles, en plein cœur du quartier du Midi. Un projet original et innovant, prévoyant la création de 96 lofts de 80 à 120 m2.
- A Bruxelles-Ville, ce sont les anciens bâtiments de L’Oréal, au cœur du Quartier du Béguinage, qui seront convertis en 28 logements. Le projet veillera particulièrement aux économies d’énergie.
- A Ixelles, ce seront les bureaux Solvay qui seront reconvertis en logements. Un projet assez écologique de 170 logements.
On le voit, la reconversion de bureaux en logements est dans l’air du temps. A Bruxelles, une étude montre que les bureaux obsolètes (plus de 15 ans) représentent 36% (soit 472.000 m2) des immeubles vacants. Leur reconversion en habitat serait rentable dans les quartiers mixtes, comme l’avenue Louise. A la mi-février, un colloque sur le thème, à l’initiative de Françoise Dupuis, a confirmé la viabilité de la piste.
EN WALLONIE
Réforme du Code wallon du logement
La réforme vise principalement à introduire des principes de bonne gouvernance au sein des sociétés de logement de service public, et des principes d’éthique (Code d’éthique et de déontologie à destination de tous les administrateurs). Un axe « transparence » (par exemple représentation des locataires au sein des conseils d’administration) et un renforcement de la tutelle sur ces sociétés de logement public complètent la réforme.
EN FLANDRE
Le Ministre Marino Keulen persiste et signe : le gouvernement flamand a approuvé le projet de décret exigeant la connaissance du néerlandais pour pouvoir bénéficier d’un logement social en Flandre. D’autant que le Conseil d’Etat n’a émis aucune objection à l’encontre du texte.
Cela étant, un vaste programme de construction et de rénovation de logements sociaux est en cours. La Flandre compte 115 sociétés de logement social gérant 135.000 logements. Quelque 55.000 ménages sont sur des listes d’attente.
Cette année verra la construction de 2.200 à 2.500 nouveaux logements sociaux, et la rénovation de quelques milliers d’autres.
A noter que le premier Partenariat Public-Privé en matière de logement social s’est déroulé en Flandre avec succès. Le principe : le secteur privé établit le projet, construit et finance les logements sociaux. Il en demeure propriétaire pendant 27 ans et s’occupe des grands entretiens. A l’issue de l’échéance, les logements sont attribués à la société de logements sociaux pour un prix symbolique. Le rôle de la société de logements se limite à l’entretien quotidien et à la location. Le gouvernement flamand verse au privé la différence entre le loyer social et le prix du marché.
AU NIVEAU EUROPEEN
A la mi-février, le Parlement européen a procédé à une première lecture de la directive Bolkestein à Strasbourg. Le secteur du logement social a été exclu du champ de la directive.
Par ailleurs, Alain Hutchinson a lancé un projet de CHARTE EUROPEENNE DU LOGEMENT au sein de l’intergroupe « logement », devenu « Urban-logement ».
Si le logement reste une compétence nationale, les politiques développées par l’UE n’en exercent pas moins une influence sur le secteur du logement.
Voici les lignes de force de cette charte européenne :
- rappel d’un certain nombre de droits fondamentaux, dont le droit d’accéder à un logement sain, décent à un prix abordable. Le lien y est fait entre les droits au logement et la politique européenne de cohésion. L’expulsion d’un logement, le sans-abrisme et les conditions indignes de logements doivent être combattus en tant que violations de droits fondamentaux.
- Le rôle de moteur économique du secteur logement y est rappelé : nombre d’emplois directs et induits dans un secteur à forte densité de main d’œuvre.
- Position claire contre les ghettos, pour la mixité sociale.
- Renforcement du partenariat public-privé.
- Mise sur pied d’un observatoire européen du logement.
Dans un rapport rendu public en mars, la Commission européenne s’inquiète de l’envolée des prix de l’immobilier et de ses conséquences sur l’endettement des ménages dans certains pays de la zone euro. Les plus fortes hausses sont constatées en Irlande, en Espagne, aux Pays-Bas et en France.
DOCUMENTS ET PUBLICATIONS
Les Echos du Logement : publication gratuite de la Région wallonne (Hildegard Jost, tél. 081.332312). Epinglons dans le numéro de mars 2006, un article de Nicolas Bernard sur « Loyers : comment sortir de l’impasse ? Huit propositions pour un encadrement praticable et équilibré des loyers », et une enquête sur « Les Gens du Voyage dans nos Villes ».
Le dossier trimestriel (Art. 23) du RBDH du premier trimestre 2006 est consacré à la production des logements sociaux. Dans l’éditorial, Geert De Pauw rappelle que « plus de logements sociaux » est une des principales revendications du Rassemblement Bruxellois pour le Droit à l’Habitat. Le RBDH a voulu comprendre pourquoi si peu de logements sociaux ont été créés à Bruxelles ces dernières années (19 en moyenne par an).
(Abonnement annuel à Art.23 4 numéros par an - : 20 € . Tél : 02.502.84.63).
Le document de Gauche 21ème : « Pour le Droit au logement : Propositions pour une régulation publique du marché immobilier résidentiel ».
Contacts : frederic.delcor@iev.be et Luc.carton@laposte.net