Le Sénat adopte ce jeudi 14 décembre la proposition de résolution sur les Accords de Partenariat Economique (APE) entre l’Union européenne et les pays ACP, présentée par le Sénateur Pierre Galand, Président de la Commission Mondialisation, avec le concours de sa collègue Joëlle Kapompolé [1].
Le Sénat veut attirer l’attention du gouvernement sur l’important changement que représente les APE, qui sont censés remplacer, à partir du 1er janvier 2008, les accords de coopération actuellement en vigueur sous le régime dit de Lomé Accords de Cotonou ou Xième FED.
Sur le plan commercial, la spécificité du régime Lomé était de reconnaître que la différence de développement entre pays européens et pays ACP devait donner lieu à une différence d’obligations. Concrètement, ce postulat de base s’est traduit par la mise en place de préférences commerciales non réciproques : [cela signifie que les produits originaires des pays ACP bénéficient de droits de douanes moins élevés que les produits originaires des autres pays en développement lorsqu’ils arrivent sur le marché européen. En revanche, les pays ACP ne sont pas tenus d’offrir en contrepartie des préférences commerciales aux produits européens].
Les APE comportent deux dimensions importantes.
Tout d’abord, ils ont pour objectif la mise en place de programmes de réduction des tarifs douaniers qui doivent mener d’ici 10 à 12 ans à la création d’une zone de libre-échange entre l’Union et les pays ACP.
Deuxièmement, les APE sont conçus pour favoriser une intégration économique entre pays ACP d'une même zone afin de permettre la création de marchés plus grands et plus stables. A cet effet, l’Afrique a été divisée en quatre groupes régionaux calqués sans toutefois leur correspondre entièrement sur les organisations régionales existantes. Les Caraïbes et le Pacifique, quant à eux, représentent chacun un groupe distinct.
Ces Accords de partenariat constituent donc un virage radical par rapport au système Lomé dans la mesure où ils introduisent le principe de réciprocité dans les relations commerciales entre l’UE et les Etats ACP. Si l’Europe considérait auparavant que le développement autocentré des pays ACP devait leur permettre à terme d’intégrer l’économie mondiale, elle fait aujourd’hui le pari que c’est, au contraire, en exposant rapidement ces pays à la concurrence internationale qu’ils atteindront leur développement économique et social.
Il s’agit d’un pari fort risqué, compte tenu de la différence de développement entre les deux régions.
Il est en effet difficile de trouver dans l’histoire économique l’exemple d’un pays qui a atteint son développement grâce au libre-échange. La plupart des pays industriels avancés de la Grande-Bretagne aux Etats-Unis et du Japon à la Corée du Sud se sont développés en protégeant judicieusement et sélectivement certains segments de leurs économies, jusqu’à ce qu’ils soient assez forts pour faire face la concurrence étrangère.
Les pays ACP eux-mêmes font régulièrement part de leurs inquiétudes quant au peu d’attention portée par la Commission européenne à la dimension développement dans les négociations APE.
[1] La résolution a été adoptée par tous les parlementaires à l’exception du Vlams Belang.